DECONFINER … LIBERATION OU CONFORMISME ?

C’est le grand jour ! Je devrais être content, et pourtant … je ne me sens pas très bien.
Qu’est-ce qui explique que mon collègue de travail, vieil ami de 15 ans, maintenant sorti du confinement et porteur d’un masque tout comme moi, longe le mur du couloir lorsqu’il m’y croise?
Comment se fait-il que pénétrer un bureau inoccupé depuis 45 jours, dont je suis le seul occupant et qui a été désinfecté par mes soins à mon arrivée me semble toujours aussi redoutable?
Comment puis-je expliquer que mon regard soit aussi méfiant sur chaque personne ou objet que j’aperçois alors que je sais que moins de 5% de la population a été infecté par le COVID-19, et que ces personnes ne restent pas contagieuses plus de 15 jours?
Pourquoi suis-je autant apeuré par l’éventualité d’une contamination quand je sais que je ne fais pas partie des personnes « à risque » ?

Si je prends quelques secondes de recul, je ne peux que m’interroger.
Mais m’interroger sur quoi précisément ?
Sur ma bonne compréhension de l’épidémie ?
Sur la qualité des informations que j’ai reçu ?
Sur ma capacité à vivre « avec » un virus mortel ? … Sur quels sujets dois-je m’interroger ???
J’ai beau tourner ceci dans ma tête 100 fois, et tenter de me raisonner, il y a toujours une petite voix qui me dit des phrases qui commencent par « OUI, MAIS … »
Et si ce OUI MAIS qui se veut par nature voix de la raison, n’était en fait que la voix de mon émotion?
Pas de mon émotion propre évidemment, puisque mon émotion est saine, elle est belle.
Mon émotion est une part intégrante de mon intelligence, on le sait !
Non, si il s’agissait d’une émotion construite, collectivement d’abord, puis individuellement ?
Si cette émotion prenait sa source dans ce que je devrais visiblement savoir, comprendre ou ressentir ?
Si cette émotion devait correspondre à celle des autres qui sont visiblement sûrs d’eux ?
C’est vrai !
Nous vivons une période de « Guerre », comme nous l’a dit notre chef des armées, où notre pays compte ses « morts » dont le nombre est égrainé chaque jour par le chef de la santé.
Une sorte de guerre « mondiale », puisque l’ensemble de la planète meurt et se confine.
Alors quand je sors de chez moi, malgré toutes les précautions prises, l’application avec laquelle je me suis auto-autorisé à aller faire des courses, courir, respirer en sécurité… Rien à faire, tout ça est trop grave pour que je me sente rassuré.
Il n’y a qu’à écouter les savants qui redoutent tant cette 2ème vague !!!
Qui suis-je pour en douter ?
Oui, j’ai peur!
J’ai peur d’avoir oublié de désinfecter une touche de mon PC.
Peur que mon collègue n’ai pas été aussi scrupuleux que moi durant le confinement, que finalement le virus soit très virulent chez moi bien que je ne sois pas si vieux, pas si gros, pas diabétique… au fait, … je n’ai jamais fait de test pour le diabète!!!
En fait, je ne sais même plus si j’ai vraiment peur, ou si je suis simplement perdu.
Je vais donc reprendre depuis le début, mais pas comme d’habitude.
Cette fois-ci, je vais laisser de côté toute notion émotionnelle, et je vais relever les faits. Uniquement les faits.
Les faits, juste les faits.

Ce que je sais:
La planète a été touchée.
Mais 90% des décès touchent 6 pays: Espagne, Italie, France, Belgique, UK, USA.
En france: 26 000 décès environs, identifiés COVID-19.
Cette identification s’est faite sans tests la plupart du temps comme recommandé par les directives du ministère de la santé. Peu de détails ont filtrés, mais M. Salomon à dit que 41% des décédés avaient plus de 70 ans. Les autres étaient porteurs d’au moins 2 comorbidités (diabète, obésité, cancer.…)
Le nombre de personnes infectées (ou ayant été infectées) seraient par extrapolation de 2 à 3 Millions… Sur 67 M soit 5 % de la population en étant pessimiste. Et au moins 80% ne déclareraient pas la maladie.
Suis-je exposé?
Je sais les gestes barrières, j’ai un masque, je peux me laver les mains…
Je suis donc paré face au risque.
Maintenant je vais introduire mes émotions:
1/ La peur:
– La mort me fait peur … mais cela ne date pas d’aujourd’hui !
Ce danger invisible me terrorise … bien que le risque de rentrer en contact avec le virus est inférieur à 0,05%, et que dans minimum 80% des cas je ne déclarerais pas la maladie. Sans compter que je sais me protéger.
– Les messages continus à la TV et les images de malades, de morts, de services hospitaliers me serrent le ventre et la gorge … aies-je vu d’autres sujets d’actualité? Le reste existe-t-il encore ?
2/ La colère
Pourquoi suis-je obligé de vivre ça ?? D’abord qu’est-ce que « ça » ? Je retourne au chapitre La peur…
Pourquoi n’y a-t-il pas de traitement ? 1,42 Millions de personnes sont considérées guéries dans le monde… donc il y a bien des traitements, ou l’absence de traitement n’empêche pas la guérison.
Qui est coupable ? Et si je laissais cette question pour plus tard ?…
3/ La tristesse
Quel avenir pour mes enfants! … De qui dépend leur avenir ?
Mais quel est ce monde que je ne reconnais plus… Est-ce que je le regarde vraiment ? De quel monde s’agit-il ? Celui que je me connais ou celui que l’on me raconte?
A ce stade, je me demande si ces émotions sont bien MES émotions !
Et si je me contentais en réalité de suivre l’émotion générale, celle transmise par les communications médiatiques ?
La bonne émotion, à la bonne place
Alors quelle est ma réelle émotion aujourd’hui, et puis-je lui accorder la place qui lui revient, c’est à dire en soutien de mon raisonnement et non l’inverse ??
Puis-je résister à cet environnement qui prône le TOUT-émotionnel ?
Est-ce que mon besoin peut passer avant l’envie ?
Est-ce que j’ai besoin de votre avis pour savoir ce qui est bon ou mauvais ?
Suis-je un adulte ?…
Et si j’agissais malgré moi comme une grande partie de la population, comme ces personnes sur lesquelles on a évalué le conformisme de groupe ?
Aujourd’hui je me déconfine, … Et si je décidais aussi d’être libre ?
Vidéo Conformisme de groupe:
Vidéo Expérience de Asch.
Ce témoignage est peut-être réel…
Raphaël FRASCA